AGRICULTURE URBAINE

BASE

AVRIL 2019

Lecture : 15min

Définition

Une agriculture est dite urbaine si elle est «localisée en ville ou à sa périphérie, dont les produits sont majoritairement destinés à la ville, et pour laquelle il existe une alternative entre usage agricole et non agricole des ressources (foncier, eau, main d’œuvre..).» Moustier et Mbaye, 1999

Nous allons à travers cette publication, faire un état des lieux des différentes configurations d’agriculture urbaine présentes aujourd’hui et leurs caractéristiques. Commençons par un retour en arrière afin de comprendre pourquoi et comment est née l’agriculture urbaine et quels sont ses avantages.

Origine

L’agriculture urbaine existe depuis toujours dans les pays émergents, où elle peut jouer un rôle majeur dans l’alimentation des populations et est toujours stimulée par une situation de crise.

Exemples :

CUBA – La Havane 1989.

Chute du Mur de Berlin. Deux ans plus tard, effondrement du bloc soviétique. Cuba perd alors son principal fournisseur de pétrole, de matériel agricole, d’engrais chimiques et autres pesticides. Tous les ingrédients sont réunis pour que le pays plonge dans le chaos. D’autant que le blocus américain se resserre. Produire de la nourriture devient une question de sécurité nationale. Face à une crise aiguë de la production alimentaire, un passage à l’agriculture urbaine paraissait une solution évidente et nécessaire : la production urbaine minimisait les coûts de transport et une production à petite échelle limitait le besoin de machines. Aujourd’hui, l’île compte près de 400 000 exploitations agricoles urbaines, qui couvrent quelques 70 000 hectares de terres jusqu’alors inutilisées et produisent plus de 1,5 millions de tonnes de légumes. La Havane est à même de fournir 50% de fruits et légumes bio à ses 2,2 millions d’habitants, le reste étant assuré par les coopératives de la périphérie.

ÉTATS-UNIS – Détroit

Rattrapée par la mondialisation et la désindustrialisation, gangrenée par un chômage et une criminalité exponentiels, Détroit a fini de boire la tasse avec la crise financière de 2008, qui a vidé de leurs occupants des quartiers entiers, envahis depuis par les herbes folles. Sous le poids de ses 18,5 milliards de dollars de dette (14 milliards d’euros), l’ancien bastion de la construction automobile américaine est aujourd’hui sous tutelle. C’est dans cette ville américaine désormais en faillite, qu’un nouveau modèle de société émerge à petits pas dont les piliers sont : autonomie, écologie, anti-consumérisme et solidarité. Alors que Détroit a perdu la moitié de ses habitants en cinq ans, ces derniers se retroussent les manches pour transformer les friches, qui occupent un tiers de la superficie de l’agglomération, en jardins potagers. En ayant fait passer le nombre de jardins de 80 en 2004 à 1 600 aujourd’hui, des citoyens ont commencé à se réapproprier leur territoire et à se réinventer un futur.

Bénéfices agricoles

Améliorer la production des parcelles en optimisant les ressources du milieu : une parcelle agroforestière de 100 ha pouvait produire autant de biomasse (bois et produits agricoles) qu’une parcelle de 136 ha où arbres et cultures auraient été séparés, soit un gain de 36%.

Diversifier la production des parcelles : productions agricoles, bois d’œuvre, bois énergie, fruits, fourrage, paillage – Restaurer la fertilité du sol via les feuilles : 40% de la biomasse d’un arbre retourne au sol chaque année

Garantir qualité et quantité de l’eau : capacité de dépollution des arbres. Véritables filtres, ils limitent une partie de la lixiviation des nitrates, réduisant ainsi la pollution des nappes phréatiques.

Améliorer les niveaux de biodiversité et reconstituer une trame écologique : La diversité des structures et des espèces de ligneux et d’herbacées fournit des habitats et de la nourriture pour un cortège floristique et faunistique important. Elle permet de réintroduire des auxiliaires 1 E.Torquebiau in «L’agroforesterie, des arbres et des champs» de cultures, abeilles et autres pollinisateurs, gibier, prédateurs… et recrée une continuité écologique à l’échelle des territoires.

Stocker du carbone pour lutter contre le changement climatique : 99% de la matière solide de l’arbre provient du CO2 atmosphérique : les arbres sont donc d’excellents puits de carbone.

En pleine terre

R-Urban – Unité Ressourcerie et plateforme d’éco-construction / Boulevard d’Achères, Colombes

Objectif : recréer une économie locale

R-Urban propose des outils et des aménagements pour faciliter l’implication citoyenne dans le rééquilibrage entre production et consommation à travers des circuits courts locaux en accompagnant notamment des projets émergents à échelle locale et régionale. Des flux, des réseaux et des circuits de production-consommation sont formés à travers des activités, le plus localement possible et de la manière la plus diversifiée. Plusieurs projets pilotes sont développés actuellement à Colombes le projet propose la création d’un réseau de résilience autour de trois unités prototypes avec des fonctions urbaines complémentaires.

RecyLab

Une unité de recyclage et d’éco-construction constituée autour d’une série d’équipements permettant le recyclage de déchets urbains et leur transformation en sous-ensembles pour l’écoconstruction.

AgroCité

Une unité d’agriculture urbaine civique qui consiste en une micro-ferme expérimentale, des jardins collectifs, des espaces pédagogiques et culturels et des dispositifs de production énergétique, de compostage et de collecte d’eau pluviale.

EcoHab

Une unité résidentielle, coopérative et écologique constituée par un nombre de logements expérimentaux et d’espaces collectifs en partie auto-construits

Edible Schoolyard

Les écoles offrent un environnement propice pour questionner l’accès à la nourriture en milieu urbain. Plusieurs grands cuisiniers ont participé à un débat sur la qualité des repas à l’école et sur le rapport que nous avons généralement à la nourriture. Le programme de cour d’école comestible a été lancé en 1995 par Alice Walters, grande cuisinière et auteure renommée, et la Fondation chez Panisse. Il ne vise pas seulement à améliorer les repas à la cantine, mais également à apprendre aux enfants à cultiver et préparer des aliments sains.

Le projet de cour d’école comestible a commencé à l’école primaire Martin Luther King à Berkeley, en Californie, avec la création d’une cuisine et d’un jardin potager biologique de 4000 m2 sur un terrain vacant adjacent. Les instituteurs et éducateurs spécialisés l’utilisent comme salle de classe interactive permettant d’intégrer les systèmes alimentaires au programme scolaire. La sensibilisation de la communauté de Berkeley aux thématiques de l’alimentation a permis de créer un jardin potager dans de nombreuses écoles. Le menu des repas de midi à l’école a également été amélioré.

Le premier projet de ce type à New York est en cours de réalisation sur l’ancien parking de l’école Arturo Toscanini à Brooklyn. Il a été conçu par la Société d’architecture WORK qui intègre régulièrement des éléments d’agriculture urbaine à ses projets. Pour ses architectes, le défi consistait à créer un environnement pour un programme scolaire complet et interdisciplinaire, conforme aux directives de l’État de New York, qui associe l’alimentation aux matières enseignées à l’école. Les architectes ont mis en évidence le potentiel d’un bon travail de conception pour la création d’un environnement d’apprentissage unique axé sur l’alimentation : une série d’éléments architecturaux reliés entre eux offrent à la fois des espaces éducatifs particuliers associés à un jardin potager biologique de 1000 m2 et des espaces de culture et de cuisine opérationnels tout au long de l’année.

Le projet s’articule autour d’une salle de classe-cuisine entourée d’une serre mobile d’un côté et, de l’autre, d’un « mur technique » comprenant différents modules qui assurent l’autosuffisance du bâtiment. Ce projet implique aussi bien les élèves que leurs parents et les habitants du quartier dans le processus de production alimentaire et démontre les principes de l’autosuffisance. Des discussions invitent à une réflexion sur la façon dont les systèmes alimentaires influencent la santé, la nutrition et l’environnement. Le projet montre le rôle qu’une conception de bonne qualité peut jouer lorsqu’on entreprend de rendre ces concepts accessibles à un large public, mais aussi comment l’alimentation et l’agriculture urbaine peuvent enrichir l’expérience éducative et l’environnement de l’apprentissage.

Hors-sol

Hôtel Pullman

Ce potager et verger de 650 m2 appartiennent à l’Hôtel Pullman, à deux pas de la Tour Eiffel ils sont au cœur d’un aménagement paysager sur dalle de 1200m2. Conçu avec une démarche écologique globale, Topager cultive sans insecticides, sans pesticides, en produisant sur place son compost : le bois n’est pas traité et provient des forêts voisines, le compost et les végétaux de pépinières locales. Un composteur recycle les épluchures et les déchets verts pour fertiliser les cultures. Ici sont cultivés des variétés anciennes de tomates, délaissées par les maraîchers traditionnels parce que n’ayant pas un assez bon rendement, mais également des courges, des topinambours, des haricots, de la salade, des herbes aromatiques.

Expérience T4P (Toits Parisiens Productifs Projet Pilote)

Ce projet Pilote vise à constituer et à tester des substrats de culture utilisables sur les toits, à partir de matériaux organiques locaux, issus du recyclage de déchets urbains. En effet les déchets produits par les villes représentent une source d’énergie locale et valorisable, soit un double intérêt environnemental. Il s’agissait également d’évaluer dans quelles mesures la pollution des villes pouvait contaminer les produits de cultures, et représentait un danger pour le consommateur.

La toiture est située à un équivalent cinquième étage au 16 rue Claude Bernard 75005 Paris. – La partie de l’expérimentation présentée ici comporte quinze bacs de culture de 0,64 m2 avec cinq combinaisons décrites ci-contre, chacune étant répétée trois fois. L’une est témoin, un terreau horticole universel utilisé classiquement par les jardiniers (C). Les quatre autres sont constituées de trois déchets organiques issus de la ville : du compost de déchet vert et du bois broyé fournis par la société BioYvelinesServices et du marc de café « mycéliumisé » fourni par la société Up Cycle sur lequel des pleurotes ont poussé. Les trois premières combinaisons (M1, M2 et M3) reprennent les principes de la culture en lasagne (Lanza dans Collaert, 2010) alors que la dernière (M4) consiste en un mix de compost et de bois (50/50 v/v). Les bacs ont été plantés en deux successions culturales salade-tomate. Les productions obtenues à partir des différents substrats ont été comparées, les évolutions physicochimiques de ceux-ci mesurées tout comme les éventuels polluants (métaux lourds) issus des substrats ou de la pollution atmosphérique qui pourraient se retrouver dans les produits récoltés.

Résultats après deux ans : une teneur en éléments traces métalliques (Cu, Cd, Pb, Hg et Zn) en dessous des normes françaises et européennes en vigueur dans l’ensemble des végétaux et substrats testés. Ceci suggère la faisabilité d’une production agricole saine au sein d’une ville dense telle que Paris. – L’intérêt de l’utilisation de déchets organiques urbains en tant que substrat de culture en comparaison à un terreau horticole d’un point de vue de la production de biomasse. On note aussi l’augmentation de la production observée lors d’une inoculation biologique (en vers de terre ou en marc de café « mycéliumisé ») ou d’une culture en couche. – Un niveau de production relativement élevé, aux alentours de 70t/ha pour une succession salades-tomates entre avril et octobre équivalente voire supérieure à celle observée pour des maraîchers biologiques en plein air dans la région.

Kilomètre alimentaire

Au cours des dernières décennies, la globalisation des filières agroalimentaires s’est traduite par un « éloignement » géographique, culturel, social de plus en plus marqué entre la sphère de la production et celle de la consommation. Les préoccupations environnementales liées à la globalisation croissante des filières agroalimentaires et à l’utilisation intensive des transports ont certainement stimulé l’émergence et l’utilisation du concept de «kilomètres alimentaires». Ces derniers correspondent simplement à la « distance parcourue par les denrées agroalimentaires de l’exploitation agricole au consommateur » (SMITH et al., 2005). Les kilomètres alimentaires se calculent en multipliant la distance parcourue par le volume des aliments acheminés. Plus cette distance est grande, plus l’impact est lourd sur notre environnement – et tout ceci au nom d’aliments plus variés pour la population d’un pays.

La distance en kilométrique est souvent «traduite» en unités de pollution comme des émissions de CO2 ou en unités monétaires, ce qui permet d’obtenir un résultat homogène pour les différentes étapes et donc de les rendre comparables. En supposant des filières agroalimentaires parfaitement identiques, sauf sur la distance parcourue, la réduction des kilomètres alimentaires serait préférable du point de vue environnemental. La réflexion doit aller au-delà de la seule prise en compte du mode de transport et intégrer dans son évaluation d’autres critères de durabilité parmi lesquels l’utilisation des sols, la consommation d’eau et d’énergie.

Faut-il privilégier les activités économiques locales au nom de la consolidation d’un tissu social ou privilégier le développement économique de petits producteurs dans des pays en développement ? Par exemple, plusieurs rapports au ton alarmiste s’inquiètent des distances considérables parcourues par les denrées alimentaires, comme le rapport GABALLA et ABRAHAM en Australie, et repris dans plusieurs médias, affirmant que 29 des denrées alimentaires les plus communes en Australie avaient parcouru 70 803 km avant d’atteindre le consommateur, soit presque deux fois le tour du globe (GABALLA et ABRAHAM, 2007). Vulnérable en cas de blocus (routier ou autre), la ville ne possède que trois jours de réserve. Les Parisiens sont d’autant plus vulnérables que les produits viennent souvent de très loin et passent quasi systématiquement par la case Rungis et accumulent les kilomètres alimentaires. Ce sont souvent plusieurs milliers de kilomètres qui sont parcourus par les aliments, sans compter le déplacement du consommateur au supermarché, bien souvent en voiture. Finalement, le produit consomme plus d’énergie pour son déplacement, qu’il n’en apporte à son consommateur. Cela a des conséquences sur les déchets : en Europe, 160 kg de déchets d’emballage sont émis, dont les 2/3 sont d’origine alimentaire. Approximativement, un tiers des impacts environnementaux d’un ménage sont liés à la consommation de nourriture et de boisson.

Relocalisation Paris Intramuros, par sa densité n’offre que peu de place pour une autosuffisance alimentaire, les jardins partagés ont plus pour objectif de créer de la convivialité, que d’assurer sa subsistance, la solution est à trouver au-delà, à l’échelon régional, par une coopération étroite entre consommateurs locaux et producteurs. C’est à cette échelle (la biorégion) que devra être considérée l’autosuffisance locale des Parisiens, en créant des liens supra locaux, où l’échelle pourra varier en fonction des produits ou services considérés. La surface couramment admise pour répondre aux besoins d’une famille de quatre personnes est de 250m2, ou 35 à 40 m2 par personne selon certaines sources. Concrètement, attribuer ou donner accès à 50m2 (soyons généreux) à chacun 2,2 millions de parisiens intramuros reviendrait à 11 000 ha, soit quasiment la superficie de Paris intramuros, trois fois la superficie de l’aéroport Charles de Gaulle (que la ville post carbone devra récupérer), ou par personne le double d’une place de parking (ratio de 25m2, englobant la voie d’accès au parking). 11 000 ha c’est aussi l’équivalent d’une ceinture verte (ou plutôt maraîchère) localisée à environ 10 km de Paris, d’une circonférence de 110 km et d’1km d’épaisseur. Ce pourrait être la limite de l’agglomération.

Autosuffisance locale

Paris Intramuros, de par sa densité n’offre que peu de place pour une autosuffisance alimentaire, les jardins partagés ont plus pour objectif de créer de la convivialité, que d’assurer sa subsistance, la solution est à trouver au-delà, à l’échelon régional, par une coopération étroite entre consommateurs locaux et producteurs. Le développement des AMAP en est la préfiguration. Leur nombre augmente, mais peine à répondre à la demande, faute de producteurs et de terrains disponibles. Il y a actuellement plus de 100 AMAP en Île-de-France. D’autant que les espaces agricoles représentent plus de 45 % du territoire d’Île-de-France (CESR) et sont parmi les plus fertiles d’Europe. Ces terres sont cependant principalement tournées vers le conventionnel. 60 000 ha/an de terres agricoles disparaissent, et en France une ferme disparaît toutes les 15 minutes. Le problème est principalement lié au fait que les produits sont souvent destinés à l’export, peu tournés vers le marché local. Le prix des terres agricoles reste un frein à l’installation. Il s’agit alors de réserver l’achat des terres à vocation agricole aux acteurs agricoles biologiques, tournés vers le marché local. Un développement à grande échelle est possible pour des solutions de type AMAP comme le montre l’exemple japonais (tekei) où 1/3 des aliments consommés proviennent des tekei. D’autres solutions devront être menées en parallèle pour assurer l’autosuffisance de Paris. Il s’agit tout d’abord de se poser une question fondamentale : de quelle surface a-t-on besoin pour assurer sa propre subsistance et celle de sa famille ?

TEIKEI, JAPON (origine de l’AMAP)

C’est en étudiant le contexte historique des années 1960 au Japon que l’on découvre les éléments qui ont suscité l’apparition du modèle du teikei. En effet, ces années ont résonné avec la catastrophe industrielle due à la contamination de l’eau de mer par le mercure rejeté par une usine électrochimique, et plus connue sous le nom de « maladie de Minamata » (Gigon, 1975 ; Jobin, 2006). Cette tragédie aiguisa la conscience environnementale des citoyens et fit naître au Japon puis dans la sphère asiatique une éthique industrielle post-traumatique. Des processus de mobilisation de l’opinion nipponne face aux risques de contamination industrielle laissèrent apparaître de nouvelles dynamiques de communication et de médiation environnementales. Parallèlement, à la même époque dite de « Haute Croissance », une logique sociale d’idéologie du progrès encourageait l’utilisation d’engrais et de pesticides de fabrication chimique. C’est à la conjonction de ces facteurs qu’apparut le concept de teikei en 1965 qui concernait en tout premier lieu les coopératives laitières puis s’étendit à d’autres secteurs de l’agriculture.

Cette initiative émanait d’un collectif de mères de famille japonaises rassemblées sous la forme d’un seikatsu club ou « club de la vie » qui s’inquiétaient de voir l’agriculture s‘industrialiser avec un recours massif aux produits chimiques (Poirier, 2007). Afin de s’inscrire en faux contre les politiques agricoles encourageant la monoculture et l’usage d’engrais chimiques, les petits producteurs entendaient ainsi favoriser la production et la consommation locales tout en relançant la consommation de produits de saison. Le modèle du teikei correspond à un mode de vente sous la forme d’achat en groupe occasionnant une livraison en petites unités. En échange de l’achat par souscription de la récolte du paysan, le producteur s’engage à fournir aux membres du teikei des aliments cultivés sans produits chimiques.

Le teikei traduit un système d’échanges égalitaire marqué par le partage de valeurs et de responsabilités communes entre producteurs et consommateurs. Il est important d’évoquer le développement parallèle de deux modèles d’inspiration de partenariat solidaire aux États-Unis et au Canada. Il est possible de remonter à la propagation, dans un premier temps, de ce modèle de partenariat du Japon au milieu des années 1980 vers l’Amérique du Nord – aux États- Unis sous la forme de Community Supported Agriculture (CSA) puis, au Canada en tant que Community Shared Agriculture (De Muth, 1993 ; Van En, 1995). Puis un couple de producteurs français importa le modèle des CSA en France au tout début des années 2000, époque de création de la première AMAP dans le département du Var.

Très tôt, les AMAP revendiquèrent leur affiliation aux principes constitutifs des teikei en termes de partenariat solidaire, de charte, etc. Même si Tokyo est l’une des villes du monde les plus grandes et congestionnées, entre les réseaux complexes ferroviaires, routiers et électriques, l’agriculture locale produit assez de légumes pour nourrir potentiellement 700 000 citadins. La capitale japonaise, comptant actuellement 13 millions de personnes, ne possède que 2,5% de terre arable ce qui assure tout de même un taux d’autosuffisance alimentaire de 40%.

Urban underground farming, JAPON

Pasona HQ est une entreprise dont la fonction première est les ressources humaines. Entre 2003 et 2009 un programme de ferme urbaine souterraine y a été aménagé sur une surface de 1 000 m2 où étaient pratiquée la culture de fleurs, d’herbes aromatiques, de riz, de fruits et légumes et où était installée une salle dédiée aux semis. Lorsque Pasona HQ a eu besoin de s’agrandir, ses dirigeants ont choisi de rénover leur bâtiment avec l’aide du cabinet Kono Design en y intégrant Pasona O2 : un potager de bureau nommé Pasona Urban Farm. C’est ainsi que plus de cent variétés différentes de fruits et légumes, herbes aromatiques sont cultivées au bureau. A chaque culture sa méthode : l’hydroponie pour les tomates, les haricots verts poussent sur les murs et les salades (empilées sur des étagères) sont éclairées par des tubes fluorescents verts. Quant aux semis, ils sont réalisés dans un système à tiroirs afin d’optimiser l’espace. Même si le système n’est pas autosuffisant, les récoltes sont utilisées par la cafétéria de l’entreprise et servies aux 2000 employés. Les bénéfices d’un tel projet sont conséquents vis-à-vis du bilan carbone. En effet, ce nouvel aménagement de l’immeuble à permis de faire baisser les émissions de CO2 de deux tonnes par an.

Éco pâturage

Téma la vache

L’association Téma La Vache (TLV) réintroduit l’animal de la ferme en ville, pour interroger et sensibiliser aux rapports qu’entretiennent les hommes, les animaux et leur milieu. Née en région Parisienne en 2010, elle propose de « gérer et conduire des animaux de ferme (vaches, moutons, chèvres, animaux de basse-cour…) en ville, pour un entretien à moindre coût et écologique des espaces verts, délaissés ou en attente ». C’est en 2011 qu’elle met en œuvre un projet expérimental de ferme laitière avec six vaches bretonnes Pie Noire, en partenariat avec le Parc de Saint-Germain-en-Laye, sur dix hectares, aux pieds de la terrasse dessinée par Le Nôtre. TLV adapte le choix de l’espèce, de la race, le nombre d’animaux, la conduite des troupeaux en fonction de l’espace à pâturer. Elle s’appuie sur des critères propres aux animaux (races anciennes, rusticité, comportement, qualité des produits…) mais aussi sur le contexte de la ville (espace traversé par les citadins, clôtures, quantité de consommateurs potentiels en circuit court, lieu de réserve de foin…) et en fonction des autorisations obtenues et des accords passés avec les propriétaires.

The City Chicken Institute

Les poulaillers font une réapparition dans les villes à travers la distribution de poulaillers par les collectivités pour réduire le traitement des déchets ménagers. A New-York, une association à but non lucratif, the Chicken Institute, propose des visites et ateliers pour montrer qu’il est possible d’élever des poules en ville et assure une assistance pour les propriétaires en cas de difficultés. Cette association dépend de la New-York Restauration Project (NYRP) qui œuvre pour l’amélioration des espaces verts en ville.

Avantages

Avantage de l’éco-pâturage: le groupement des animaux en troupeaux permet de les surveiller. On remarquera plus vite les problèmes tels que la météorisation. En empêchant le surpâturage des animaux, on permet aux plantes et à leurs racines de maintenir en place le sol superficiel fertile. Le pâturage tournant favorise une nouvelle pousse des plantes fourragères pour les animaux. Il permet à la prairie de reposer assez longtemps pour que les herbages produisent de bonnes racines et graines. Le fait d’entourer certaines zones par des enclos permet la croissance de plantes fourragères particulières, qui pourront ensuite être récoltées et données à manger aux animaux. Le pâturage tournant combat les parasites aussi bien internes qu’externes. Le pâturage tournant accroît la fertilité du sol grâce aux déjections des animaux. Management & Rotation : on entend par aménagement ou gestion des pâturages le contrôle du pacage par tous les animaux. L’herbe doit être broutée assez régulièrement pour maintenir à un niveau plutôt bas la croissance des herbages parvenus à maturité, mais pas au point d’être au ras du sol. Pour protéger un pâturage, on peut l’entourer d’un enclos ou d’une haie. Les animaux sont ainsi confinés dans une zone donnée pendant qu’on laisse reposer le pâturage voisin. De cette manière, le terrain peut être utilisé pour le pacage pendant une à deux semaines, le laisse ensuite reposer pendant plusieurs semaines pour permettre à l’herbe de repousser. Les périodes de repos doivent être d’au moins trois semaines pour une repousse rapide de la prairie, et sinon de six semaines.

Jardin forêt / forêt comestible

Une des techniques phares en permaculture, est la forêt comestible, dont le concept est très ancien dans certains pays des tropiques. Une forêt comestible cherche à imiter cette superposition de différentes couches, mais en utilisant une majorité d’espèces comestibles tout en favorisant les synergies. Concrètement et pour ce qui concerne la conception « multi-étagée »: – Sur le sol est d’abord planté un premier étage de fruits et légumes, voire de céréales. – On trouve au-dessus les buissons, arbustes fruitiers donnant des fruits, des baies. – La couche supérieure est constituée d’arbres fruitiers, tels que les cerisiers, pommiers, pruniers etc (pour les climats tempérés). – Puis enfin la canopée, la couche d’arbres les plus hauts, dont le rôle peut être de remonter des nutriments pour ses congénères du sous-sol, fixer l’azote atmosphérique de l’air, produire des noix, du bois de chauffe, d’œuvre etc… – Les autres couches sont les racines, tubercules comme les carottes, topinambour…, les plantes grimpantes comme les vignes, lianes telles que les kiwis, et enfin les plantes rampantes. Une fois réalisée, la forêt comestible se développe et évolue d’elle-même. «Personne ne fertilise ou n’irrigue une forêt. La forêt est autonome. Si vous êtes capable de recréer une forêt nourricière alors votre principal effort sera d’en récolter les fruits» indique Robert Hart, spécialiste britannique qui a introduit le concept en Occident. Ce système devient stable au bout d’une quinzaine d’années.

Agroforesterie

L’agroforesterie se définit comme un système de gestion durable de la terre qui augmente la production totale, associe des cultures agricoles, des arbres, des plantes forestières et/ ou des animaux simultanément ou en séquence et met en œuvre des pratiques de gestion compatibles avec la culture des populations locales.»1 Il existe une grande diversité d’aménagements agroforestiers : alignements intra-parcellaires, haies, arbres émondés (trognes), arbres isolés, bords de cours d’eau (ripisylves)… Ces pratiques comprennent les systèmes agrosylvicoles mais aussi sylvopastoraux, agrosylvopastoraux ou pré-vergers (animaux pâturant sous des vergers de fruitiers).