WISE CITY
Le concept de Smart City renvoi à une ville intelligente et numérique, où l’implication des habitants et l’intelligence collective semble s’éffacer au profit de l’exploitation des données. La ville du futur et des habitants reste floue et bancale si on ne les implique pas dans cette construction. Car si les habitants ont la faculté d’améliorer et de concevoir les villes de demain, il est important de rappeler que l’intelligence n’est pas forcément synonime de technologie. Sans associer les citoyens, dés le départ, à la conception des projets urbains, ces derniers s’avéreront être de grandes et coûteuses déceptions, aux conséquences fâcheuses.
Dans cette quête de la ville du futur il y a une alternative, moins connue, qui pointe le bout de son nez. C’est le concept de la Wise City, “wise” pour “sage” en anglais. Cette idée, déjà théorisée, est d’améliorer la ville à l’aide de solutions nécessitant moins de ressources et moins d’énergie que dans la Smart City, et de s’appuyer sur l’intelligence collaborative et les ressources déjà à notre disposition. Pourquoi ne pas commencer par faciliter, améliorer et mutualiser la richesse que nous avons sous la main ?
Principes de la Wise City
Créer des synergies
Par exemple dans certaines zones industrielles en Corée du Sud, au Japon, en Europe, en Australie ou aux États-Unis, des parcs éco-industriels réussissent à réconcilier performance économique et respect de l’environnement. Comment font-elles ? Dans ces zones, un ensemble d’entreprises collaborent pour former des “symbioses industrielles” dans la gestion de l’énergie, de l’eau, des déchets et des échanges de services ou de produits. Les déchets de l’un sont les matières premières de l’autre, le transport des ressources limité et l’intérêt économique avéré : autant d’arguments pragmatiques qui ont convaincu 20 000 parcs à travers le monde.
Vue de la bio-raffinerie de Pomacle-Bazancourt, près de Reims (France). Elle transforme chaque année 3 millions de tonnes de biomasse végétale à des fins non-alimentaires ©Altus ARD
Autres exemples de parcs éco-industriels :
- Le parc de Tianjin – Chine
- Le parc de Kalundborg – Danemark
- Le Port de Rotterdam – Pays-Bas
- Le parc de Deux Synthe – Près de Dunkerque (France)
Le cas d’Albi
Des bénévoles jardiniers participent à la transformation du paysage urbain : ils font apparaître jardins partagés, arbres fruitiers et keyholes dans les rues de la cité. Les espaces verts de la commune d’Albi sont également mis à disposition de tous ceux qui ont des graines à semer, pour qu’ils se les approprient. Les prochaines étapes ? Réhabiliter les jardins ouvriers et les potagers délaissés des personnes âgées, et mettre en relation les propriétaires débordés par leur jardin et les jardiniers volontaires. Ensuite, il faudra convaincre la grande distribution de s’approvisionner auprès des producteurs locaux.
Plusieurs potagers urbains où les légumes sont à disposition des habitants (Crédits : Les Incroyables Comestibles)
Wise Data
Cette approche pédagogique est difficilement réalisable dans le cas du Big Data : les jeux de données sont hétéroclites et la nature du Big Data le rend impossible à analyser par le cerveau humain. En associant des données locales et accessibles, une représentation visuelle compréhensible et des mécanismes de gamification, les citoyens ont désormais la possibilité de comparer leur consommation et leur impact sur la ville aux données de leurs pairs. Rien de tel pour impliquer les habitants dans la Wise City que de rendre transparent les dessous de leur ville.
Prenons l’exemple de Daniel Latorre, un développeur de logiciels de longue date, qui depuis le 11 septembre 2001, s’intéresse à la société civile. Alors qu’il travaillait au tracé des pistes cyclables pour New York, il s’est rendu compte que « le design urbain est l’interface de la ville ». Cela permet aux habitants de s’y retrouver, d’en tirer parti. Ensuite, il cette analyse lui a permis de comprendre que : « les villes conçues autour des voitures ont, aujourd’hui, un mauvais design. Nous avons besoin d’une nouvelle interface. » Il a alors lancé un projet de carte digitale sur laquelle les new yorkais étaient invités à indiquer où ils souhaitaient voir installés les stations pour vélibs locaux.
L’outil principal est donc la cartographie sociale (crowdsourced mapping) créée avec un logiciel open source. « Quelque soit le projet – création d’un parc, design ou amélioration d’une rue, entre autres – ça permet aux gens de mettre leurs idées sur une carte, » explique-t-il. « Ça agit comme logiciel social en connectant les gens qui prennent conscience de l’existence des autres à mesure qu’ils s’en servent. Ils ignorent tout de leurs voisins et les mécanismes de participations leur permettent de se trouver. »
Les gens redécouvrent leurs villes, les administrateurs prennent connaissance des détails des zones sous leur responsabilité. « Les cartes digitales permettent aux différents agents d’avoir littéralement un terrain de rencontre virtuel de la même manière qu’une place publique est un espace où les gens se trouvent. Autant de mécanismes, ajoute-t-il, qui sont absents « de la rhétorique des villes intelligentes ».
Depuis Octobre 2018, les collectivités territoriales françaises de plus de 3 500 habitants ont pour consigne d’ouvrir leurs données conformément à la loi pour une République numérique. Voir exemple infographie Ville de Toulouse dans les sources.
Vers une ville frugale
Les 5R
Conclusion
Celle-ci se trouve probablement parmi ses habitants, la Wise City la bien compris et porte une attention particulière aux habitants, à la taille du projet et à son budget. Pour se développer de manière optimale elle se repose sur la collaboration, la frugalité ou le partage de ressources. Car, si la technologie va jouer un rôle croissant dans le design des villes, ces principes associés à un usage réfléchi de cette technologie peut être une solution optimale possible pour demain.
Pour résumer les bonnes pratiques de la Wise City, il est question tout d’abord du budget des projets où être fauché et créatif résonne comme une opportunité. Il est nécessaire d’anticiper la croissance des projets, de préférer les systèmes ouverts et évolutifs aux systèmes stables et fermés. L’échelle du projet se doit de rester à une taille humaine et de trouver des solutions à l’échelle locale en mettant à l’honneur la collaboration. On se doit d’être curieux, d’aller chercher le meilleur de ce qui existe ailleurs mais ne pas copier bêtement sur ses voisins. Il est important de faire confiance à la capacité de progression des humains plutôt que d’installer des outils technologiques pour compenser leurs faiblesses et défauts. Enfin, préférer le bien-être des habitants et la résilience de la vie à son aspect esthétique tout en conservant la variété des habitants (âge, sexe, activités) et encourager leur cohabitation. Il faut donc être inclusif, pragmatique et simple.
- La « frugalité heureuse » pour une ville encore plus économe ! – Lumières de la ville
- Wise city vs Smart city : j’ai rencontré Daniel Latorre – Francis Pisani
- Open Data définition : C’est quoi ? À quoi ça sert ? – Le Big Data
- Wise city, une alternative à la Smart City – ECV Digital